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Auditionné mercredi matin par la commission des Lois, Lionel Jospin a exprimé des positions transpartisanes pour convaincre les députés d'approuver sa nomination au Conseil constitutionel.
Lionel Jospin a fait son retour à la vie publique. Mercredi, l'ancien Premier ministre a obtenu le feu vert des députés de la commission des Lois pour devenir membre du Conseil constitutionnel pour une durée de quatre ans et trois mois. Une "manière différente de servir encore la République, dégagé d'un esprit partisan", s'est-il réjoui, lors de son "grand O" devant les parlementaires, dont deux de ses anciens ministres, Daniel Vaillant et Roger-Gérard Schwartzenberg.
Proposé par le président de l'Assemblée nationale, Claude Bartolone, pour remplacer Jacques Barrot, décédé brutalement le 3 décembre, Lionel Jospin a d'ores et déjà enfilé ses nouveaux vêtements de Sage, au-dessus de la mêlée partisane. Il évoque ainsi d'emblée le "risque d'ingratitude" qui pèse sur le juge constitutionnel qui ne doit pas faire dépendre ses décisions de la couleur politique de celui à qui il doit sa place.
"Je n'ai pas l'intention de mener une quelconque campagne politique"
Interrogé plusieurs fois sur l'incompatibilité entre la fonction de juge constitutionnel et celui d'un engagement partisan, Lionel Jospin se veut rassurant. "Je n'ai pas l'intention dans les quatre ans à venir de mener une quelconque campagne politique." Il en profite pour rappeler aussi sa position, déjà évoquée dans le rapport de la commission sur la rénovation et la déontologie de la vie publique qu'il présidait: il ne veut plus qu'il y ait de membres de droit à vie au Conseil constitutionnel. Un point de vue désormais partagé par le président de la République.
Et de préciser qu'il ne s'agit en rien d'une "question de personnes" alors que plane l'ombre de Nicolas Sarkozy, membre de droit du Conseil constitutionnel (même s'il a décidé de ne plus siéger au sein de la juridiction) et chef du principal parti d'opposition. L'automaticité de l'appartenance des anciens chefs de l'Etat au Conseil constitutionnel n'est "pas conforme à l'esprit républicain", estime Lionel Jospin qui prend soin de rendre toutefois hommage, sans le nommer, à la qualité du travail de Valéry Giscard d'Estaing, seul ancien Président à participer aux travaux de la rue de Valois.
Ne pas "bouleverser" le Conseil constitutionnel
Prudent, Lionel Jospin n'appelle pas à la révolution. "Lorsque l'on rejoint une institution (...), il est sage de ne pas à l'avance vouloir la bouleverser", démine-t-il. Non donc à une réforme pour transformer le Conseil constitutionnel en une Cour Suprême américaine, qui tiendrait à la fois de Cour constitutionnel, de Cour de Cassation et de Conseil d'Etat. Rien contre les questions prioritaires de constitutionnalité (QPC), une "réforme importante", qui, depuis 2010, ont considérablement accru le travail des juges constitutionnels.
Mais si le Conseil constitutionnel était saisi d'une QPC portant sur une loi votée alors qu'il était à Matignon, Lionel Jospin a indiqué qu'il "se déporterait", c'est-à-dire qu'il ne participerait pas au vote.
Des points de vue consensuels qui ont convaincu jusqu'au rapporteur UMP de la commission, Guillaume Larrivé. Celui-ci a conclu que Lionel Jospin avait "démontré" lors de son audition, "trois qualités éminentes: l'expérience de l'Etat, l'impartialité personnelle, qui est une vertu, et sans doute une fidélité aux principes classiques de notre République". Les parlementaires se sont laissés eux aussi convaincre: 40 ont voté en sa faveur, 10 contre, quatre ont voté blanc.